Le mardi 05 juin 2007
Jooneed Khan
Trois semaines après les législatives de mi-mandat aux Philippines, dénoncées comme «violentes et frauduleuses» par des observateurs canadiens, les résultats se font attendre, ce qui fait dire à Stefan Christoff que «la fraude continue».
Christoff était l'un de cinq observateurs montréalais à ce scrutin, où les électeurs étaient appelés à renouveler la totalité des 250 députés de la Chambre, 12 des 24 sénateurs, et quelque 18 000 fonctionnaires municipaux et locaux.
«Les élections se déroulent dans un contexte socio-économique de crise - plus de 50% des 85 millions de Philippins survivant, selon l'ONU, avec moins de 2$ US par jour - et elles sont dominées par des dynasties qui disposent de leurs propres milices armées», a déclaré hier Christoff à La Presse.
Le Centre d'appui aux Philippines de Montréal avait délégué trois autres observateurs: Minerva Gutierrez, de Québec solidaire, Freda Guttman, artiste, et le père Artemio Calaycay, de l'Église indépendante des Philippines. Roderick Carreon, de l'organisation de travailleurs philippins Siklab Canada, était aussi membre de l'équipe.
Fraudes et violences
«Les observateurs ont été témoins de l'achat de votes, de l'intervention de l'armée dans le processus de vote, et du refus systématique du droit de vote à des électeurs», a déclaré la mission dans un texte remis aux médias dimanche lors d'une conférence de presse.
Deux semaines avant le vote, la police avait fait état de 80 cas de violences ayant fait 30 morts. Elle avait compté 37 milices privées à la solde de politiciens.
«Nous avons parlé aux gens de l'ambassade du Canada, qui ont décrit les Philippines comme "une démocratie vibrante" », a dit Christoff. Le ministère des Affaires étrangères à Ottawa n'avait pas rappelé hier soir La Presse.
La semaine dernière, une pétition signée par 5000 Canadiens a été déposée au Parlement, lors d'une conférence de presse tenue en présence d'élus du Parti libéral, du NPD et du Bloc québécois. Elle dénonçait les violations des droits de la personne aux Philippines, dont plus de 1000 enlèvements et assassinats politiques.
Gloria Arroyo invite le pape
«Ces élections sont d'une importance politique majeure pour la présidente Gloria Macapagal Arroyo» qui «se bat pour garder le contrôle des deux chambres du Congrès», écrit la mission d'observation.
«Elle est appuyée par les États-Unis pour mener la guerre au terrorisme dans le sud du pays et pour appliquer des politiques néolibérales", a ajouté Christoff. "Elle veut assurer 100% des profits aux investisseurs étrangers, c'est-à-dire qu'ils n'auraient à payer ni tarifs ni impôts, à l'instar des compagnies minières qui ont déjà un tel statut», a-t-il ajouté.
En attendant les résultats, Mme Arroyo, dont l'élection à la présidence en 2004 reste contestée, était hier au Vatican, où elle a été reçue par le pape Benoît XVI, un exercice propre à aider son image auprès des Philippins.
Avant la rencontre, son chef du protocole avait indiqué que Mme Arroyo parlerait de l'état socioéconomique de son pays, des législatives et de la violence attribuée aux «escadrons de la mort» qui a fait des centaines de victimes depuis son élection en 2004. Elle a aussi invité Benoît XVI à se rendre dans son pays en juillet 2008.
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